ROME, le 14 septembre 2002

C'était la dernière soirée d'Alaska à Rome et la jeune femme comptait bien en profiter. Elle avait rêvé de visiter l'Italie pendant des années, mais le cancer l'en avait empêché jusqu'à maintenant. Ces derniers jours avaient été fantastique et pour finir en beauté, elle avait décidé de passer la nuit dans les rues pour prendre des photos. Son sac à dos entrouvert et son appareil photo autour du cou, la jeune femme se baladait sans se soucier du monde depuis quelques heures lorsqu'une épaule massive la bouscula. Elle perdit l'équilibre et s'étala sur le sol dans un bruit sourd. Le jeune homme qui l'avait percuté s'était immédiatement arrêté pour l'aider à se remettre sur pieds en s'excusant. « Scusa. » Avait-t-il répété plusieurs fois avant qu'elle ne lui lance un sourire pour lui faire comprendre que tout allait bien. Et c'était à ce moment là que leurs regards s'étaient croisés. La brunette avait senti un frisson la traverser. Ce bel italien lui faisait de l'effet. Une première pour elle qui n'avait jamais été attiré par quiconque. « Il n'y a pas de mal. » L'anglais n'étant à priori pas la langue maternel de l'homme, elle avait parlé lentement pour qu'il puisse la comprendre. « Moi Fabio. Toi ? » « Alaska. » Les amis de Fabio qui commençaient à s'impatienter le firent savoir, mais il les envoya bouler d'un simple geste de la main en gardant son regard dans celui de sa nouvelle amie. « Boire ? » Elle avait hoché la tête en pensant qu'il allait l'amener dans un bar pour partager un verre. Elle ne le connaissait pas et pourtant elle voulait passer un moment avec lui. Seulement ce ne fut pas dans un bar qu'il l'amena, mais chez lui. Un appartement tout en haut d'un immeuble, des petites pièces bien remplies et décorées avec style. Ils ne parlaient pas beaucoup, mais ils réussissaient tout de même à se comprendre. Fabio lui prépara des lasagnes qu'il accompagna de vin rouge. Du vin qu'elle sentit rapidement lui monter à la tête et après son troisième verre, elle perdit toute sorte de contrôle sur elle même. Fabio dut le sentir, car il se fit plus entreprenant et après quelques minutes à s'échanger des baisers passionnés, il glissa sa main sous la jupe de la brunette, la remontant jusqu'à atteindre la culotte de la belle. Ce fut comme un électrochoc pour Alaska qui se redressa d'un coup, repoussant le jeune homme de toutes ses forces. « Non ! Je ne peux pas. Je suis désolée. » « Pourquoi ? » Il n'essaya pas d'aller plus loin, il la regardait avec des tonnes de questions dans les yeux. Elle l'avait perdu avec tous les signaux contraires qu'elle lui envoyait. Une seconde elle l'embrassait comme si sa vie en dépendait et la seconde d'après elle refusait qu'il soit à côté d'elle. En tout cas, elle était soulagée de voir qu'il ne tentait rien de plus, car tout à coup, elle se sentait dans une position de faiblesse immense. « Je suis... vierge. » Ses joues devinrent rouges. Elle avait honte de l'être, mais aussi de devoir l'avouer à un inconnu. Fabio ne la forçait pas à le dire, mais elle lui devait bien ça après cette soirée. « Oooh. Juste bisous alors ? » Comment lui dire non ? Elle en avait envie alors en oubliant toutes ses appréhensions, elle retourna s'assoir sur le canapé devant lui. Ses mains partirent se poser sur ses joues et elle l'attira pour un baiser pleins de passion. Puis un autre. Et un autre. Jusqu'à ce que la chaleur entre ses cuisses devienne insupportable et qu'elle ne craque. Fabio avait beau être un étranger pour elle, c'était maintenant qu'elle voulait devenir une vraie femme, avec lui. Elle se libéra et lorsqu'il le comprit, il prit soin de la guider avec douceur pour que ce moment soit parfait. Inoubliable. Et ça le fut. Du moins pendant quelques heures, car en se réveillant Alaska regretta. Qu'avait elle fait ? Elle regarda l'homme qui la tenait toujours dans ses bras et ferma ses yeux qui menaçaient de se mettre à pleurer. Elle devait fuir avant qu'il ne se réveille et c'est ce qu'elle fit après lui avoir laissé un mot d'excuse. Tout le long du trajet qui la ramenait chez elle, elle se demanda pourquoi elle avait agis comme une cancéreuse en fin de vie alors qu'elle était en rémission. Guéris d'après les médecins. Pourquoi s'était elle laissé apprivoiser dans le lit d'un homme qu'elle ne connaissait pas pour sa première fois...

PASADENA, le 9 janvier 2004

Des coups sur sa porte réveillèrent Alaska qui s'était couché tard pour avancer dans les dessins de son prochain livre pour enfant. Elle se tira du lit en enfilant une veste de son lycée beaucoup trop large qu'elle ne prit pas la peine de fermer. Elle n'avait en rien sa classe habituelle, mais son regard trahissait son état de fatigue. Cependant lorsqu'elle ouvrit sa porte et qu'elle vit Fabio faire un pas vers elle, elle oublia tout. Elle se retrouva plaquée contre un mur par un corps puissant, des mains dans ses cheveux bruns et des lèvres sur les siennes. Il avait beau avoir croisé sa route une seule fois, ça ne lui paraissait pas étrange de le voir débarquer comme ça. Elle en était même heureuse. La brunette ne réfléchit pas, ne posa pas de question. Elle poussa la porte du bout du pied et l'entraina vers sa chambre qu'elle venait à peine de quitter. Ils y firent l'amour autant de fois qu'ils le purent, mais ça n'avait plus rien à voir avec ce qu'ils avaient partagé à Rome. Cette fois Fabio lui transmit toute la frustration et la colère qu'il avait pu ressentir en se réveillant seul. Et il fit de même... Car en se réveillant quelques heures plus tard, elle était seule, un mot sur la table de chevet. Elle aurait pu lui en vouloir, mais ce fut plutôt l'inverse. Elle s'en voulait de lui avoir fait ça un an et demi plus tôt. Elle comprenait maintenant comment il avait pu se sentir en ouvrant les yeux sur un lit vide. « C'est peut être un rêve. Ce ne serait pas la première fois que tu rêves de lui comme ça... » Murmura-t-elle en essayant de se convaincre, mais elle savait que ce n'était pas possible. Elle tenait un morceau de papier qui lui prouvait le contraire, puis il y avait aussi les traces qu'il avait laissé sur son corps. Il était passé par là. Alaska sentit son cœur se serrer et elle se mit à pleurer dans l’intimité de sa chambre.
Alaska s'était finalement tirée de son lit alors que le soleil se couchait, elle était nue, triste et avançait tel un zombie pour aller se nourrir. Elle n'en avait pas envie, mais son estomac grognait depuis plusieurs heures. Une bouteille de vin et une assiette de macaroni au fromage. C'était tout ce qu'elle avait ramené au salon et qu'elle picorait à présent dans l'espoir d'oublier. Les choses n'auraient jamais du se passer comme ça. Ils auraient du parler, elle se serait expliquée... L'occasion se présenta bien plus tôt que prévu. La porte de son appartement s'ouvrit et il était là avec quelques sacs de courses et un air détendu sur le visage. Alaska s'enroula dans un plaid et fila droit vers lui avant de lui administrer une baffe magistrale qui le fit sourire. « Pourquoi ? C'est si marrant que ça de jouer avec le cœur des filles ? » La jeune femme sentit ses yeux s'humidifier à nouveau et elle détourna le regard pour ne pas qu'il le voit. Elle allait s'éloigner de lui lorsqu'il l'attrapa et la bloqua contre lui. Perdue, elle resta immobile quelque instant avant d'entrouvrir la bouche. « Je suis désolée, je n'aurais pas du partir comme ça. » « Non. » Approuva-t-il. « Et je n'aurais pas du essayer de me venger. C'était puéril. » L'anglais presque parfait qu'il parlait à présent la surpris et elle se mit à le fixer avec de grands yeux bruns. « J'ai appris. Je voulais pouvoir communiquer avec toi. » « Je pensais que tu m'oublierai, que je serais la seule à me souvenir de ce qu'il s'est passé. » « Tu rigoles ? J'ai pensé à toi tous les jours depuis cette nuit là. » « Vraiment ? » Le baiser qu'il lui offrit confirma ses dires. Et malgré le fait qu'ils se connaissaient à peine, Alaska savait qu'elle venait de rencontrer le bon. Le seul. L'unique. True Love.

PASADENA, le 22 octobre 2009

C'était le grand jour, elle allait se marier aujourd'hui. Sa robe, simple et élégante, la serrait sous la poitrine et glissait le long de ses jambes. Elle avait l'air plus grande. Comme la tradition l'exigeait, elle avait quelque chose de nouveau, d'ancien, d'emprunté et de bleu. Elle était prête à faire le grand pas à l’exception d'un petit détail. Elle n'avait pas écrit ses vœux. Elle avait bien essayé, mais n'y était pas arrivée. La journée défila et arriva le moment où elle devait parler. Une cinquantaine de personnes la fixaient, mais rien ne venait. La peur de parler en public prenait le dessus et ses yeux s'invitèrent sur le sol. C'est à ce moment là qu'elle sentit les mains de Fabio entourer son visage pour le relever. « Tu n'es pas obligée. » « Mais tu m'as... Tes vœux étaient parfaits. J'ai aussi des choses à te dire, à te promettre. Je deviens ta femme parce que tu as réussi à me séduire il y a plus de sept ans. Il t'a fallut une unique soirée et c'était fait. Tu avais déjà mon coeur. J'ai longtemps regretté d'être parti ce matin là. J'ai pris peur. Peur de tomber amoureuse et de briser l'homme que j'aime avec un cancer. Mais le cancer j'ai appris à l'oublier depuis que tu m'as retrouvé. Tu me donnes assez de force pour que je me sente forte, guérie pour toujours. Tu nous as construit des fondations solides parce que je n'en étais pas capable et maintenant je pense que c'est à mon tour de faire quelque chose pour nous. J'aimerai porter tes enfants. Deux au moins. Un garçon et une fille. Je veux que tu puisses connaitre cette joie et je veux que ce soit avec moi. Je veux être ta femme, la mère de tes enfants, ta meilleure amie, je veux être tout pour toi. Je t'aime Fabio. For Always and More. Aussi longtemps que je vivrai, je t'aimerai. » Finit elle en posant ses lèvres sur les siennes avec délicatesse. Il l'entoura de ses bras en retour avant de la faire tourner vers l'audience. « Ma femme ! Enfin... » Alaska rigola en entendant son mari, maintenant il pouvait plaisanter du fait qu'elle avait été dure à épouser. Trois demandes en mariage et plus de neuf mois à attendre le grand jour après avoir enfin eu une réponse positive.
Dans la voiture les menant à la salle de réception, Alaska se mit face à son mari. Fière de pouvoir le dire. Elle vit dans ses yeux qu'il pensait qu'elle s'approchait de lui pour une tout autre raison, mais elle réussit à lui faire comprendre ce qu'elle voulait vraiment avant de commencer à parler. « J'ai toujours été à toi du jour où on s'est rencontré. Tu as été mon premier et tu seras mon dernier. Je n'ai connu que toi et je ne veux pas en connaitre d'autre. Que tu sois mon mari ou non, je t'aime. I love you to the moon and back. » La jeune femme se redressa tant bien que mal à cause de sa longue robe qui entravait ses mouvements. « Mais maintenant que je suis toute à toi, il va quand même falloir continuer à prendre soin de moi. » « Oui tu auras toujours droit à ton petit verre de vin rouge devant la télé pour le film du dimanche soir. » « Ahh l'homme parfait... »